Sanctions contre les bénéficiaires du RSA : la droite départementale choisit d’appliquer la peine maximale
Application maximale des sanctions en direction des bénéficiaires du RSA en cas de manquement : un choix injuste, inefficace et dangereux dans les Pyrénées-Atlantiques
Lors de la Commission permanente du 28 novembre 2025, les Conseillers départementaux des Pyrénées-Atlantiques ont examiné une délibération relative à la modification du Règlement Départemental de l’Action Sociale pour l’application d’un nouveau régime de sanctions en direction des bénéficiaires du Revenu de Solidarité Active (RSA).
Cette modification du Règlement Départemental de l’Action Sociale, à laquelle le groupe des élu.es de la Gauche départementale s’est opposé, va mettre en péril le minimum vital de près de 15 000 de nos concitoyens allocataires dans notre département.
De quoi parle-t-on ?
Publié le 31 Mai 2025, un décret d’application de la loi Plein Emploi a instauré un nouveau régime de sanctions qui marque un tournant majeur dans la politique anti-sociale du Gouvernement. 16 associations et syndicats ont à ce titre déposé quatre recours devant le Conseil d’État, dénonçant la disproportion manifeste des sanctions et l’atteinte au droit à des moyens convenables d’existence consacré par la Constitution.
Depuis la parution de ce décret, tout allocataire du RSA est menacé de se voir suspendre de 30 à 100 % de son RSA dès le premier manquement : non-respect du Contrat d’engagement, oubli d’un rendez-vous, … Une fois cette suspension notifiée, les personnes ne disposent que de 10 jours pour contester cette décision, un délai qui ne leur permet pas de se défendre correctement.
L’exécutif départemental a fait un choix politique délibéré : celui de la sévérité maximale dans l’immense majorité des cas de manquements au contrat. À nos yeux, ce choix est injuste, inefficace et dangereux :
Injuste d’abord, car il frappe les plus fragiles. Nous parlons de personnes qui vivent avec 646 euros par mois, auxquelles on va retirer ce minimum vital au motif qu’elles n’auraient pas rempli une obligation administrative ou qu’elles seraient en difficulté d’insertion.
Punir les pauvres n’a jamais fait reculer la Pauvreté !
Inefficace ensuite, car le RSA n’est pas un luxe, c’est un filet de sécurité. Suspendre les allocations, ce n’est pas « responsabiliser », c’est précipiter encore davantage de familles dans la précarité, les éloigner de l’emploi et multiplier les situations d’urgence sociale.
Dangereux enfin, parce que ce choix instaure une logique punitive, au cœur même de notre politique sociale. Nous savons que l’accompagnement fonctionne quand il est fondé sur la confiance, la proximité et le suivi personnalisé, et non sur la sanction.
Nous le disons clairement : la lutte contre la précarité et contre la pauvreté ne se mène pas à coup de suspension, de radiation mais en prenant la voie de l’accompagnement, de la formation, du travail social et de moyens humains et financiers.
Certes, le Département est tenu d’appliquer la Loi et les décrets mais rien ne nous interdisait d’appliquer ces textes avec discernement et nuance puisque le régime de sanctions comprend des seuils minimums et maximums. Certains Départements, majorité et opposition réunies, ont d’ailleurs fait le choix de l’application minimale des sanctions.
Dans les Pyrénées-Atlantiques, par conviction politique, l’exécutif départemental a sciemment opté pour l’application maximale dans l’immense majorité des cas :
Par exemple, pour un premier manquement au contrat d’engagement, le décret édicte une suspension d’au moins 30% du RSA pour 1 à 2 mois. Ici, l’exécutif départemental choisit d’appliquer 80% de suspension pendant 2 mois. Concrètement, cela veut dire qu’un allocataire va vivre avec 131 euros par mois.
En cas de réitération, le décret prévoit une suspension ou une suppression d’au moins 30 % du RSA pour une durée de 1 à 4 mois. Le Président Lasserre choisit la sévérité absolue avec la suppression totale du RSA pendant 4 mois et la radiation de la liste des demandeurs d’emploi.
C’est une faute sociale, politique et humaine.
Une faute sociale car le Département est la collectivité cheffe de file de l’Action sociale : son rôle n’est pas d’enfoncer nos concitoyens dans la précarité. Lorsque le décret nous laissait un espace pour la prudence et la nuance, l’exécutif départemental fait le choix de la sévérité maximale.
Une faute politique ensuite, car le Département est la collectivité de la Solidarité. C’est à travers elle que la République se montre protectrice. En optant pour le niveau de sanctions le plus élevé, la droite renverse le sens même de notre mission, transformant une politique d’insertion en mécanique punitive.
Le message est clair : la pauvreté serait une faute à corriger et non une situation à accompagner. Les élu.es de la Gauche départementale ne partagent ni cette vision, ni cette méthode.
Faute sociale, faute politique mais aussi, faute humaine, parce qu’au bout des décrets et des barèmes, il y a des hommes, des femmes, des enfants, des familles. Il y a des personnes fragiles, le plus souvent éloignées de l’emploi par manque de formation, faute de soins ou de transport ou tout simplement victimes d’accidents de la vie : ce sont ces personnes qui vont être frappées.
Les travailleurs sociaux le savent, les élus de terrain le savent : une sanction – qui plus est, maximale – ne crée pas de l’insertion ; elle crée de la rupture, nourrie d’une philosophie libérale reportant sur le seul allocataire la responsabilité de son exclusion.
Une philosophie qui, une nouvelle fois, distille cette petite musique mille fois entendue selon laquelle les allocataires du RSA sont présentés comme des profiteurs du système voire des fraudeurs, qui toucheraient indument des aides pour un grand nombre, plutôt que de chercher activement un travail.
Il y a deux mois, en Session, le Président Lasserre nous parlait de cohésion sociale, de conditions d’entraide et de recréer du lien humain… Un objectif noble, mais en votant pour ce nouveau régime de sanctions en conscience et en responsabilité, nos collègues de la majorité départementale croient-ils en ce qu’ils ont écrit et dit sur la cohésion sociale ?
Par-delà la posture et l’affichage, la cohésion sociale ne peut pas être qu’un slogan. Elle exige des décisions cohérentes, fidèle aux principes affichés, car c’est cette contradiction qui nourrit légitimement l’incompréhension de nos concitoyens et qui affaiblit la confiance en la parole publique.
Notre Département compte 15 000 Allocataires du RSA ; 15 000 hommes et femmes que le Département s’apprête à enfoncer encore plus dans la pauvreté et dans la précarité…
Michel MINVIELLE
Pour le groupe des élu.es de la Gauche départementale des Pyrénées-Atlantiques







